Alice Riverstone, Mandryka. -Paris - Dargaud Editeur,
1985.
48 p. col. ill. 30 cm. "D'après Lewis
Carroll."
La bédé Alice, c'est d'abord la blonde nymphe aux formes
généreuses en couverture du numéro 21 (décembre 1983) de feu
Charlie Mensuel. Une gâterie
visuelle qui se retrouve à l'intérieur du mag avec un extrait de
l'histoire illustrée par Riverstone et écrite par Mandryka.
En 1985, le propriétaire de ladite revue - les éditions Dargaud
- publie en album l'intégralité de cette version coquine du
célèbre roman de Lewis Carroll.
Une œuvre bien plus digeste que le dernier
loukoum cinématographique gerbé par Disney (Alice de l'autre côté
du miroir, suite du Alice au pays des merveilles de Tim Burton).
Seule avec sa studieuse frangine, Alice s'ennuie. Même au bord de
l'eau, les vacances peuvent parfois être monotones. Lorsqu'elle
aperçoit un lapin avec une horloge dans le bide, elle ne se pose
pas de questions et lui court après. Le terrier dans lequel
s'engouffre l'animal n'empêche pas Alice de continuer à le suivre. À l'intérieur, elle chute dans un trou sans fin et atterrit devant une maison. L'aventureuse franchit le pas de la porte et, plus loin, s'introduit dans une pièce dans laquelle elle se retrouve enfermée. Soudainement, le corps d'Alice rétrécit puis s'agrandit démesurément! Elle ne le sait pas encore mais notre héroïne est déjà au pays des merveilles...
Pas de doute, nous sommes bien dans l'univers surréaliste de
Carroll. L'Alice du duo Riverstone/Mandryka se retrouve mêlée à
des péripéties où l'absurde règne en maître. Elle évolue dans un
rêve où tout peut arriver, où la réalité n'a plus aucune prise
sur les évènements. Les repères du lecteur s'effacent au profit
d'une poésie de tous les instants. Et ça marche puisque les
épisodes les plus dingues s'enchaînent sans temps morts
(cf. l'assemblée de créatures dinosauresques dirigée par un moine
à queue de rat ou l'assaut donné sur une Alice géante par une
armée au look de conquistador). Un trip sous acide prenant la
forme d'une aventure épique, tantôt drôle, tantôt inquiétante,
toujours étonnante.
Le dessin de Riverstone (de son vrai nom Bernard Kamenoff) se
montre à la hauteur de toute cette folie furieuse. Outre des
décors parsemés de détails sexuels (des portes à la forme
vaginale, une petite partouze dans les collines), ce sont bien
sûr les contours fantasmatiques d'Alice qui marquent les esthètes.
Presque toujours à oilpé, ce personnage à la silhouette hors-norme ne
supporte pas longtemps sa robe bleue ciel. Une bombe de papier qui donne
toute sa sensualité à une bd
ne virant jamais à l'érotisme corsé. Sexy mais aussi curieuse,
ingénue et finalement assez courageuse,
Alice n'est au fond qu'une gamine dans un corps d'adulte,
une pulpeuse Vénus s'abandonnant à un monde
aussi féerique que périlleux.
Par la suite, Riverstone offrira d'autres pépites à la bande
dessinée cochonne comme Gomorrhe (1989), Thamara & Juda (1990),
la série des Nagarya (trois tomes de 1991 à 2009), La fugue
infinie (1993), Chloé (2003) et Judith et Holopherne
(2003). Dommage qu'aucun album ne soit dédié à Anna Oh, autre
chimère libertine jadis entraperçue dans les pages de
Charlie Mensuel (encore) et signée sous un autre pseudo de
Kamenoff : Caumandre (je me souviens
encore de ce mémorable numéro 35 de mars 1985...). Quant au
scénariste Mandryka (prénom : Nikita), il a été l'un des
cofondateurs de L'Écho des savanes (en 1972), le rédacteur en
chef de Charlie Mensuel (d'avril 1982 à juillet 1983) et celui de Pilote (en ).
Également dessinateur, le bonhomme est l'auteur de plusieurs
récits humoristiques dont le plus connu reste celui du Concombre
masqué, créé en 1965. Alice demeure peut-être bien l'œuvre la
plus friponne de Mandryka et on aurait bien aimé lire la suite
promise à la dernière page. Pas grave, en l'état, cette bd
s'avère mignonne comme tout, légère comme une plume,
et rappellera des souvenirs à tous ceux qui ont grandi en
potassant Métal hurlant et... Charlie Mensuel, bien évidemment.
En bref, Mandryka adapte Alice Au Pays Des
Merveilles de Lewis Carrol. Bien entendu, on
retrouve quelques étapes
importantes de l’histoire originelle, mais
l’absurde des rencontres
improbables se mêle aux courbes affolantes
et parfaitement matures
d’Alice.
Avec une bonne dose d’humour et de jeux de mots, la lecture est drôle
et parfois déconcertante. Certes le tout est léger. L’affolante Alice
est constamment à la recherche de vêtements ou prend les poses plus
lascives et indécentes les unes que les autres.Le voyage est hallucinant, entre rêves, drogues et rebondissements inattendus portés par des couleurs audacieuses. « Alice » reste une histoire sexy avec une héroïne dévêtue aux courbes affriolantes qui reste chaste cependant. A aucun moment, elle ne subit les assauts d’éventuels prétendants.
Malheureusement, la lecture s’interrompt abruptement et aucune suite n’est sortie officiellement, on reste donc sur notre faim.
– Un noeud ? Oh, laisse-moi t’aider à le défaire !?(Version lue Chefs d’œuvre de la BD Erotique Tome 5 – Rombaldi Editeurs)
Peter Riverstone's Alice
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